A Swiss Girl in Paris - Part 1
Chers Lecteurs,
J’avais prévu, du temps où je vivais encore dans ma tendre ville natale, Genève, d’écrire un bel article bien pimenté sur Paris, le métro, les gens, les restaurants, les magasins, bref, en gros de vous servir sur un plateau d’argent un joli récit croustillant vous racontant mes nouvelles aventures quoi… mais, comme vous avez sans doute pu vous en rendre compte, ça fait maintenant presque un moi que je vis ici, et pourtant, toujours pas l’ombre d’un nouvel article sur mon blog. Et il y a une excellente explication à cela.
Voyez-vous, chers lecteurs, je viens d’entamer une année préparatoire artistique. Pour la plupart des gens, cette phrase sonne un peu comme « je suis en vacances mais de temps en temps je gribouille un truc sur un coin de feuille ». Ouai. Pas tant !
Depuis la rentrée des cours, j’ai plus dessiné qu’écrit, j’ai plus colorié que dormi, j’ai plus découpé que mangé et j’ai bien plus gommé que facebooké. Ma relation intime avec ce petit bout de bois plus communément appelé « crayon » est passé du stade zéro au stade mariés / trois enfant / deux semaines au soleil chaque année pendant les vacances de Pâques. Vous voyez le genre. Lui et moi sommes devenus inséparable, que ce soit ma volonté ou non.
Le plus triste dans cette histoire, c’est qu’en prépa artistique, nous sommes à la première marche de l’escalier d’un building de trente étages. Nous sommes le pire du pire, les cancres, nous faisons des outrages au dessin et à la création à chaque nouvelle heure de cours. Tous nos dessins, selon nos profs, sont bons pour la poubelle, ils prennent quand même la peine de les noter histoire de nous encourager à travailler d’avantage, mais sans ça ils seraient tout juste bon à être utilisé comme papier de déménagement.
…Alors accroche-toi Jojo !
Mais finalement, peu importe les nuits blanches, les réveils à six heures, les heures de pause midi coupée en deux, les longues heures passées au Louvre à croquer des tableaux jusqu’au moindre détail, les écorchures de cutter sur les doigts et les litres de café ingurgités pour tenir encore debout à onze heures du soir…
L’important, c’est de cartonner. De toujours faire mieux que la semaine précédente, encore et encore, de ne jamais lâcher prise, de ne jamais perdre pied. Tu n’as même pas le temps de te demander si ce que tu fais te plaît ou pas, l’important c’est juste de le faire au mieux et surtout dans les temps !
En tout cas, maintenant que j’y suis, je peux déjà vous raconter mes quelques aventures d’écolière modèle. Premier cours le lundi matin, dessin d’analyse, la misère pour toutes les âmes littéraires comme moi, car au programme : perspectives, proportions, profondeurs. Les trois P, plus communément appelés « Putain de Putain de Putain ». Le prof : un punk à la langue bien pendu qui te fait de belles indirectes après être passé derrière toi :
« Les diagonales, inutile de les tracer pour me faire plaisir après coup, si vous ne les faite pas pendant la construction ça ne sert strictement à RIEN ».
Ooooook, ça c’est dit ! BON ! On change de feuille, on recommence… trente minutes plus tard :
« Ce tabouret est complètement faux »
Oooook, on change de feuille, on recommence…
Et ça continue comme ça pendant trois heures. Sinon, un cours comique aussi, c’est le modèle vivant – dessin de nu. A mes trois cours, j’ai assisté au rajeunissement de la femme, on est passé de vieille, à un peu moins vieille, à correcte. Par « correcte », j’entends qu’elle n’incitait pas (par sa nudité) au lifting intégral dès cinquante ans disons XD. Et les positions qu’elle ste font, un truc de dingue, « Le Penseur » à côté c'est du pipi de chat ! Vas-y que je prends mes mains dans mon dos, que je me tords les bras, que je contorsionne ma colonne vertébrale, et je me mets sur une pointe de pied en biais, la tête levée vers le plafond, tout ça en me déhanchant et en bombant le torse !
Sinon, l’Histoire de l’art c’est aussi une belle paire de manches. J’adore ma prof, elle est tellement passionnée par son cours, parfois elle part loin, loin, loin, et c’est donc là que tu penses au groupe facebook « si toi aussi tu crois que ta prof d’histoire de l’art vois de choses que même l’artiste a pas vu en créant son œuvre ».
Après, il y a le cours de perspective. Tirer des traits droit sans règle, j’adooooooore ! J’en veux encore ! Les diagonales, les parallèles, je ne peux plus m’en passer XD. Je rigole, à l’évidence. Il faut que je fasse dix traits pour un trouver un dans le tas qui soit à peu près correct, sauf qu’en gommant les neuf autres je fous le bordel intégral, du coup celui qui avait retenu mon attention est à peine dissociable des crottes de gomme et des cadavres de trait qui n’avaient pas le niveau de passer au stade supérieur XD.
D’ailleurs, grand moment de solitude lors de la visite du prof – il part de gauche, regarde les travaux de mes camarades :
« Oh, très bien… d’accord, c’est pas mal… »
Et moi « Hum… tu n’as pas beaucoup fait de dessin dans ta vie toi, n’est-ce pas ? »
Si je ne m’amuse pas à faire des carrés tridimensionnels dans l’espace chez moi le samedi soir ? Ah non effectivement. Mon père n’aurait pas trouvé ça très « rock’n roll » XD
Après, on passe aux choses sérieuses avec l’illustration et la communication graphique, deux cours où nos professeurs sont fans de ce que l’on appelle les « Marie-Louise ». Ce sont simplement des feuilles blanches cartonnées dans lesquelles on découpe des carrés histoire de faire une sorte de joli cadre à mettre par-dessus le dessin. Sauf qu’au final, faite dans le stress le plus total car c’est toujours le truc qu’on fait en dernier, cela donne des catastrophes internationales, avec le scotch qui dépasse, des trous entre le cadre et le papier du dessin, des taches de doigts encore sals de la technique utilisée juste avant… BREF… les 90% du temps, on se retrouve avec un voire deux points de déduction juste pour la présentation. De quoi s’arracher les ongles.
Pour finir la semaine en beauté, cours de croquis d’extérieur, un peu le même principe que le dessin d’analyse sauf qu’on profite du beau temps par la même occasion (la semaine dernière typiquement, c’était la pluie). Recrovillés sous un porche, tremblotant, carton à dessin de 50cm par 70cm, gomme dans la bouche, nous tentons de reproduire le plus fidèlement possible des bancs, des sculptures, des jeux pour enfants, des immeubles, etc… orgasmique.
Mais bon. Quand on aime on ne compte pas, et j’ai beau en parler sur un ton quelque peu satirique, j’aime beaucoup ce que je fais. J’aime encore plus le métier auquel j’aspire, et je sais que je dois passer par là si je veux me donner les moyens de réussir… donc…
Voilà, Chers Lecteurs, bonne chance à vous dans tout ce que vous entreprenez, bossez dur, allez haut… et vivez à fond !
Peace
Factory Girl